La langue Française, Môssieur !! (3 et fin)

Publié le par Le maître des Bouviers

(…)

 

Aux simplificateurs de la langue, selon leur logique en tout cas, je dis : « Simplifiez-nous d’abord la vie en fermant votre claque-merde, ça nous fera des vacances ! »

À ces réformateurs de tout poils, pour qui changer veut forcement dire progrès, je dirais aussi : « Cessez donc de vous regarder le nombril en vous imaginant qu’il est la chose la plus désirable du monde ! »

Ils me font penser, en voulant nous imposer une autre façon de pratiquer le français, à ces médecins qui, jadis heureusement, disaient à leur patient que si ça fait mal c’est que ça fait du bien, ou bien à nos chères mamans qui nous faisaient ingurgiter des potions affreuses en nous disant que c’était bon pour ce que nous avions.

 

Je me rends compte, avec effroi, que vous pourriez penser, en lisant ces lignes, que je suis un affreux conservateur réactionnaire allergique à tous changements.

 

Nenni, nenni, mes petits amis !

Je sais et je veux que la langue que l’on parle se transforme, évolue, se gauchisse, se torde pour arriver à plus de beauté, d’élégance, de talent.

Ce sont bien ceux qui veulent « ordonner » la langue qui sont réactionnaires ; ils veulent figer le français dans des règles de fonctionnement immuables et rigides.

Et si je défends, avec autant d’ardeur, les règles de grammaire c’est que c’est drôle mais, surtout, indispensable.

Un socle commun aussi riche que possible, intelligible par l’ouvrier et le ministre (pas de jugement de valeur : il y a plus d’ouvriers utiles au bonheur de la Nation que beaucoup de ministres !), qui permette de transmettre les idées et les opinions, qui puisse abattre les barrières de classes pour qu’enfin le couvreur-zingueur puisse séduire l’agrégée de Lettres.

Après tout, la séduction et l’amour est affaire de langage : qui parle bien d’amour le fait bien !

Non ?

 

En parlant de barrières de classes, réagissez donc comme moi aux dernières (pas les ultimes, hélas !) paroles de Mme Morano qui fustige les porteurs de casquettes (à l’envers) qui parlent le verlan et sont… musulmans.

Qu’a-t-elle voulu bien faire passer comme message, et à qui, en disant cela ?

Que les porteurs de casquettes ne répondent pas aux canons de la mode ? Qui fait la mode ? Elle ?

Que ceux qui portent des casquettes sont suspects de vouloir abattre la société ? Mais, nos glorieux policiers portent aussi des casquettes ? Ah, oui, c’est vrai : pas à l’envers.

Alors c’est parler le verlan qui est un signe d’infamie ? Le verlan serait une forme abâtardie de français importé de l’étranger ?


Que Mme Morano me permette de lui rappeler que le verlan se rencontre dans « Tristan et Iseut » (XIIème siècle) où un personnage, Béroul, transforme le prénom de Tristan en Tantris.

Pourquoi Mme Morano ne veut pas de locuteurs de verlan portant casquette à l’envers et musulmans ?

Si nos affreuses cités étaient peuplées de porteurs de gibus, parlant un français bien ordonné (Ah, l’ordre !) et chrétiens, cela siérait-il plus à Mme Morano ?

Puisque ceci est mon blogue, je vais vous donner mon avis sur les détestations de Mme Morano : je n’ai pas d’avis sur les couvre-chefs de quiconque sauf ceux de la reine d’Angleterre que je trouve parfaitement ridicules, je n’ai pas d’avis sur les musulmans, ils prient qui ils veulent et comme ils veulent, j’ai néanmoins un avis très tranché sur les religions qui sont de vastes escroqueries ensanglantées visant à asservir la liberté des hommes mais c’est parce que je suis athée pratiquant ET anticlérical, quant au verlan…

 

J’ai toujours beaucoup aimé cette forme de distorsion de la langue, elle est savoureuse et imagée, elle permet des constructions audacieuses et drôles.

Mais je préfère l’argot (Mme Morano a oublié qu’il existe un argot des banlieues) qui est plus délectable encore.

Parlez-moi d’un tire-jus pour un mouchoir et je vous embrasse.

Ou bien d’une nuit-grave pour une cigarette (argot des cités) et c’est l’extase.

 

Que je le demande à Mme Morano : je n’ai pas pour habitude de porter une casquette, ni un feutre mou, ni un bonnet, ni un sombrero mais j’use, à l’occasion du verlan, de l’argot, je malmène la langue française avec grand plaisir et je suis de la religion de ceux qui n’en ont pas, alors, suis-je un bon français ? Moyennement bon ? Pas bon du tout ? Ai-je passé les fourches caudines de l’acceptation de cette dame, veut-elle bien de moi sur le sol sacrée de la Patrie ?

 

Parfois il y a vraiment de quoi s’achever à coups de pelle à tarte !

Une chose est absolument certaine : Mme Morano en est une, et une belle.

 

Que veulent-ils donc tous ces politiciens professionnels ? Une police du langage ? Un code pénal vestimentaire ?

Et que les sympathisants de l’UMP se rassurent, j’aurais pu en dire autant de ce député communiste qui veut pénaliser le port de la burka sur la voie publique.

 

Je crois que ce qui les énerve le plus c’est que la langue est un lieu de liberté absolue qui échappe à leur contrôle.

 

Je ne me sens pas moins français, ni moins assimilé, parce qu’il m’arrive de parler verlan mais, si je pensais comme tous ces gens, je me sentirais beaucoup plus con.

Sûr et certain.

 

Comme disait Coluche, Mme Morano et consorts sont comme les gardiens de la paix, plutôt que de la garder ils feraient mieux de nous la foutre !

 

Pour finir, après ces joyeusetés (c’est toujours très bon de trouver une nouvelle personne à détester), je vous livre les statistiques que j’ai établies, le soir du 24 décembre, chez les parents de mon beau-frère, chez qui nous étions invités, nous étions quinze (grandes) personnes autour de la table :

- utilisation de « à » à la place de « de » (comme dans la phrase : « passe-moi l’assiette à mémé ! ») : 87

- utilisation de « Moi, je… » en début de phrase : 53

- utilisation de « Moi, je pense, personnellement… » : 3

- utilisation de « Si j’aurais… » : 11

- utilisation d’un imparfait du subjonctif : 1 (moi !)

- utilisation d’un regard bovin après que j’ai usé dudit imparfait du subjonctif : 15 (1 par personne)

 

Pour la route, un conseil de lecture.

 

La quadrilogie de Peter Hamilton « L’étoile de Pandore » en poche.

Éditions Milady

9 € environ par livre.

 

Une saga de science-fiction, où l’Empire terrien est menacé par des extra-terrestres.

C’est bien écrit, distrayant et facile à lire.

L’histoire est sans surprise finale mais palpitante.

Un bémol cependant : si l’on s’attache à quelques personnages, on a parfois un peu de mal à les situer, il y en a beaucoup : 62.

L’éditeur a, sans doute, remarqué ce petit défaut et nous fournit en début de chaque bouquin une liste des personnages, succinctement décrits, ça aide !

De la bonne, de la vraie science-fiction avec des vrais morceaux d’extra-terrestres dedans.

 

Le maître des Bouviers.

 

kestuveu dessin

 

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