Du meilleur... et du meilleur... heu...

Publié le par Le maître des Bouviers

Il faut que je vous explique mon long silence depuis ma dernière et sublime (et spirituelle et enthousiasmante et drôle et profonde et talentueuse) chronique puisqu’il faut que je vous dise tout.

Bon… heu… pas tout quand même.

Faut pas pousser mémé dans les bégonias !

 

Nonobstant cette pudeur que d’aucuns pourraient regretter (non, non et non ! Je ne vous dirais pas ce que je fais de ce corps de rêve qui fait fantasmer les malheureux qui n’ont pas l’avantage de me connaître) et malgré les études anthropologiques et sociologiques que suscitent ces chroniques à l’Université ou à l’Académie, je suis parti en vacances.

J’entends vos exclamations : « Comment ? En vacances ? Vous ? Alors que vous ne foutez déjà rien de toute la journée ! ».

Oui.

Mais ce n’est pas parce que je n’en fiche pas une rame lorsque qu’il m’arrive d’avoir une activité professionnelle que ce n’est pas fatigant.

Car, peccamineux amis, sachez que ne rien faire au degré où j’ai développé cet art est singulièrement crevant.

Surtout intellectuellement.

Si j’étais né en un autre lieu, en un autre temps, eussé-je été plus destiné aux travaux manuels accaparants ?

Peut-être.

J’aurais alors été moins victime de cet ennui qui fait les grands esprits mais qui est aussi une malédiction que Sisyphe n’aurait pas choisi en échange de son calvaire, que le ravi de la crèche de Nazareth (Jésus, puisqu’il faut bien le nommer) aurait repoussé avec effroi s’il avait eu le choix : « Quoi ? Que dis-tu Ponce ? L’ennui du Maître des Bouviers à la place de la crucifixion ? Arrête ton char, Ponce ! Et prévois double ration de clous et d’épines ! L’ennui du Maître, c’est trop affreux ! ».

Et ne vous en plaignez pas, c’est pour tromper mon ennui (qui n’est cependant pas naïf) que j’avale ces kilomètres (kilogrammes ?) de littérature à votre seul profit.

Vous pourriez m’en être reconnaissant.

Vous n’êtes qu’une bande d’ingrats doublés de sadiques qui doivent secrètement se réjouir de ma douleur.

 

Or donc, je suis parti en vacances.

Au soleil radieux et impitoyable des iles enchanteresses où des autochtones, mamelues et fessues comme j’aime, versaient dedans mon gosier avide, alors que j’étais voluptueusement alangui (et vautré) sur une plage de sable fin et blanc au point qu’il en était actinique, l’ambroisie des Dieux que j’avais pris soin d’envoyer sur les lieux en prévision de ce séjour et en avion cargo spécialement affrété : quelques hectolitres de romanée-conti 1961.

Ma félicité était complète puisque les Bouviers avaient obtenus l’autorisation du Conseil de Sécurité de l’ONU de sortir du périmètre sécurisé par la Légion Étrangère qui est le leur d’habitude.

Il faut dire que ces îles sont peuplées d’habitants aussi charmants que méritants, leur courage face aux désastres que la nature leur inflige avec une régularité aussi métronomique que cruelle ne les avait cependant pas préparés à recevoir les Bouviers en leur île.

Malgré une campagne d’information et de mise en garde, les restes du syncrétisme propre aux contrés équatoriales à produit quelques réactions d’effroi.

En descendant de l’avion, j’ai entendu des cris de terreur et des exclamations de peur que certains ont eus en voyant les Bouviers : « Les anciens esprits sont de retour ! », « Les démons sont venus nous dévorer ! », « Les vieilles légendes disaient vrai ! », « C’est l’apocalypse ! », « Les Dieux vengeurs reviennent ! », « Repentons-nous ! », « Malheur sur notre peuple ! », « Nous sommes foutus ! », « C’est la fin ! », « Au secours ! », « À l’aide ! », « Pitié ! ».

 

J’ai quand même passé de bonnes vacances et les Bouviers aussi.

Et comme les vacances sont propices aux lectures faciles, plus peut-être que toute autre période, j’avais pris grand soin de choisir quelques ouvrages dans ce dessein.

Les voici :

 

« Bouche bée, tout ouïe. »

Alex Taylor

Éditions Lattès

17.10 €

 

Je connaissais déjà ce Monsieur Taylor, j’appréciais son talent de journaliste international et, bien qu’il fût Anglais (personne n’est parfait mais même parmi ce peuple fourbe et vindicatif il existe quelque rares exceptions), il manie le français avec une maîtrise que l’on ne rencontre plus guère, ce jourd’hui, en séance du Conseil des Ministres. Hélas !

Bref, sans être particulièrement obnubilé par la carrière d’Alex Taylor (dont je me fichais un peu, il faut bien dire), je le savais talentueux en regard de l’absolue nullité de certains journalistes gaulois.

Pas plus.

Il avait même commis une sorte d’autobiographie, il y a quelques années, qui n’avait pas déclenché chez moi un enthousiasme délirant puisque je ne l’ai pas lue.

Néanmoins, je ne dois pas beaucoup me forcer pour dire avec une conviction inébranlable, après avoir lu ce bouquin, que ce garçon est un bienfaiteur de l’humanité.

Parce que ce petit bouquin est une réjouissance.

Alex Taylor nous raconte comment il a découvert les langues autres que cet idiome assez frustre qu’est l’anglais.

Le français d’abord puis l’allemand et toutes les autres.

Dans un panorama éblouissant, mais néanmoins très drôle et bien écrit, il survole la façon qu’ont les humains de parler.

Il sait nous montrer combien les langues peuvent nous paraître étranges à ceux qui ne les maîtrisent pas mais qu’elles peuvent être une source inépuisable de découvertes.

Par exemple, j’ignorais que les Irlandais n’avaient pas de mots pour dire « oui » et « non », comment font-ils ? Certaine tribu, de je ne sais plus où, à une langue spécialement et exclusivement réservée à… la cueillette des noix.

De ce foisonnement de langues (3 ou 4 mille langues parlées dans le monde), il arrive à faire une sorte de panorama comparatif qui en dit bien plus sur la mentalité des nations que n’importe quelle étude sociologique.

Les chapitres sur les traducteurs professionnels est particulièrement drôle.

Je savais que certain concept, certaines choses ou sentiments étaient intraduisibles mais je ne pensais pas que cela puisse être un tel sujet d’amusement et de compréhension des autres.

Un bateau en anglais est une bateau, en allemand c’est la soleil et le lune, en portugais une pont, ça explique beaucoup de choses pour ne parler que des genres des noms.

Au travers des langues ce n’est pas moins que le monde qu’Alex Taylor tente de nous expliquer.

À lire d’urgence.

 

« François Mitterrand 2008 Il revient… »

Anonyme

Éditions Ramsay

Chez les bouquinistes (avec de la chance)

 

J’ai retrouvé ce livre là dans ma cave où j’entrepose les bouquins en attente d’être vendus.

Il faut bien tout de même, si ça me déchire le cœur c’est nécessaire car je risquerais sans cela d’être submergé.

Bizarrement, alors que je classais les livres en deux tas distincts (« à vendre » et « à relire »), je tombais sur celui-ci dont je n’avais aucuns souvenirs.

Le fait est à souligner car j’ai une excellence mémoire (doublée d’une inoxydable mauvaise foi qui me fait « oublier » ce qui me dérange) et je ne m’expliquais pas comment diable cet ouvrage avait bien pu se retrouver dans l’antichambre de mon purgatoire littéraire.

Nonobstant ce mystère insondable je l’ai lu.

Comment vous dire ?

C’est très plaisant parce que c’est méchant, c’est drôle parce que c’est féroce.

D’évidence l’auteur anonyme est un grand spécialiste du monde politique français, il sait décrire ce qui sous-tend cette arène publique et nous apprend ce qui se passe dans la coulisse voir dans les alcôves.

Le genre n’est pas nouveau mais il fonctionne toujours : faire parler un considérable personnage historique disparu sur les affaires de notre temps, la plupart du temps pour s’en désoler.

Pour cela il faut bien connaître le personnage que l’on fait parler, non seulement sa vie mais aussi sa façon de penser.

Un pastiche en somme mais plus casse-gueule puisqu’il s’agit de François Mitterrand.

C’est réussi puisque, au fil de la lecture, on se persuade presque que c’est vraiment l’ancien président qui parle.

L’anonyme (j’ai quelque idée de son l’identité) a su prendre le style mitterrandien fait d’ironie acide à la limite de la méchanceté, de mépris souverain pour ceux qui ne sont pas aussi roués que lui et de morgue princière s’exprimant en des « mots » ravageurs et assassins.

Tous y passent : ces successeurs (l’actuel président qui se promène vulgairement avec un « téléphone que l’on porte sur soi » !), ces anciens ministres (de droite comme de gauche), ses ennemis et ses amis, les journalistes (le portrait d’un chroniqueur politique œuvrant sur « radio Luxembourg » est savoureux) et les autres dirigeants du monde.

Je suis de gauche, vous vous en doutiez (Ah, bon !!), mais je vais vous faire un aveu : je n’ai jamais beaucoup gouté la politique de François Mitterrand ; pour une bonne part il a été le fossoyeur de la « gauche » et il a fait naitre, en France, cette « social-démocratie » si tiède, si fade, si inconsistante qu’elle est prête à toutes les compromissions face aux « puissances de l’argent » pour… pour quoi d’ailleurs ?

Mais…

Mais on ne peut s’empêcher d’admirer le personnage, son sens politique et de la « combinazione », son culot infernal et sa capacité à incarner le prestige de la fonction présidentielle.

Je sais, c’est idiot, mais nous sommes en France et ce que la France veut d’un président de la République, c’est qu’il soit un peu (beaucoup ?) royal.

Faites les comparaisons que vous voulez.

Je soupçonne quand même l’anonyme auteur de ce bouquin d’être férocement de droite (travaillerait-il au « Figaro » ?) et de se venger de la droite actuelle qui oublie qu’elle est, qu’elle doit être, républicaine et gaulliste (gauloise ?), sans être nostalgique.

Bref une droite qu’on adorerait détester et pas une droite qui nous désole parce qu’elle s’attaque à l’image que la Nation se fait d’elle-même.

Par le biais d’un pastiche qui fait parler François Mitterrand nous sommes (les gens de gauche) un peu vengés du manque de prestige (et de sens politique, et d’intelligence manouvrière, et de cynisme, et d’ironie, et de mystère… ) qui nous accable aujourd’hui à la tête de l’État.

 

« Le retour du Général »

Benoit Duteurtre

Éditions Fayard

17.90 €

 

Il y a parfois comme des collisions dans mes lectures, ce livre je l’ai acheté avant que je ne retrouve celui qui fait l’objet de ma précédente critique.

Est-ce pourquoi je le trouve un peu décevant.

Peut-être.

Dans la forme d’abord : autant « François Mitterrand 2008 Il revient » était simple dans sa construction (des réflexions chronologiquement agencés), autant celui-ci oscille entre l’onirisme, la science-fiction et le regret nostalgique de ce qui fût.

Attention, hein, ça se laisse lire en 1 ou 2 heures mais on referme l’ouvrage avec un « Bof ! » un peu désabusé.

Pourquoi ?

Parce que l’idée (qui est plutôt bonne en soi) de faire « revenir » le Général de Gaulle en notre temps est mal traitée.

Le Général revient donc et prend le pouvoir.

Hélas, on ne retrouve pas l’image que l’on se fait du Général de Gaulle, Benoit Duteurtre (pourtant prix Médicis il y a quelques années) nous livre un Général qui n’est pas assez… comment dire ? Grand.

Il manque de grandeur et de réelle modernité (même s’il légalise la fumette et fait copain-copain avec une drag-queen) puisque le Général de Gaulle est une sorte de tête de mule qui, pour résoudre les problèmes de notre temps, rétablit les lois « gauliennes ».

Un peu court.

Un peu léger.

Un peu « c’était mieux avant ».

Un peu amusant cependant.

Bof, donc.

 

« Maître de soi »

Emmanuel Pierrat

Éditions fayard

17.90 €

 

J’aurais dû écrire « Maître » Emmanuel Pierrat puisque l’auteur est avocat spécialisé dans le droit d’auteur, ce qui doit être pratique lorsqu’il soumet ses manuscrits aux éditeurs.

En plus de cela, il doit être très sympathique (la profession d’avocat ne vous rend pas sympathique a priori mais je la préfère à la profession de juge, c’est mon coté anarcho-libertaire) puisqu’il a aussi commis plusieurs fictions (« L’industrie du sexe et du poisson pané », « La course au tigre »…) et qu’il a une passion pour l’érotisme, au point de nous en faire profiter dans diverses productions littéraires.

En plus il a un certain talent.

Le sujet du présent ouvrage est un peu la vie de cet avocat, il nous raconte, sans prétention, les « cas » les plus saillants, drôles, fameux, de ses clients ; les situations les plus rocambolesques et les histoires les plus exemplaires concernant l’exercice du droit.

Ce n’est ni pompeux ni jargonneux (tant mieux !) et c’est plaisant à lire.

Il n’y a pas d’excessive complaisance envers soi-même (encore que, quelques fois… ) et l’on découvre la vie des « gens du droit » qui n’est ni meilleur ni pire que la nôtre.

Au détour de quelques exemples on se rend compte aussi que ce Droit que l’on imagine rigoureux, rigide, précis, n’est parfois qu’un bidouillage mal ficelé.

Voulez-vous que je vous dise ? C’est rassurant.

Agréable lecture.

 

« Ces impossibles Français »

Louis-Bernard Robitaille

Éditions Denoël

20.00 €

 

A chaque fois, avec ce genre de bouquin, je me fais avoir.

Je les achète.

Et les ayant lus, je les verse au fonds des livres à se débarrasser d’urgence avec un « Peuh ! » méprisant.

Pour aller un peu plus loin, je me demande toujours pourquoi tous ces étrangers nous regardent avec tellement d’intérêt, pourquoi ils cherchent à nous comprendre mais surtout pourquoi ils cherchent à nous faire connaître la compréhension qu’ils ont de nous.

Bien sûr, je le sais.

Nous les intriguons, les énervons et les rendons perplexes.

Je ne vais pas rentrer dans une analyse sociologique de cette situation parce que ce serait fastidieux et que vous le savez aussi bien que moi.

L’auteur en question est québécois et l’on pourrait penser qu’il y a comme une sorte de cousinage, qu’il est plus à même de nous comprendre.

Ce n’est pas le cas.

C’est toujours intéressant de connaître ce que pensent les étrangers de nous, pas nécessaire (avouez que l’on s’en fout un peu) mais amusant.

Pour une fois ce qui est dit là-dedans est assez bien vu.

Peut-être parce que l’auteur vit avec nous depuis longtemps et qu’il nous observe sans complaisance mais avec une sorte de fascination ébahie.

Il y a tout de même un sacré bémol : c’est un livre qui ne parle (presque) que de Paris, c’est fait exprès et l’auteur s’en désole mais la France n’est pas Paris, le provincial que je suis (et qui déteste Paris, ben oui !) est toujours décontenancé par cette aveuglement des Anglo-Saxons qui considèrent que hors des Champs-Élysées il n’y a rien.

J’exagère mais à peine.

Certains chapitres sont inutilement traités, comme, par exemple, celui sur l’intelligentsia parisienne qui se regarde complaisamment le nombril et qui « fait » la « pensée française ».

C’est inutile et très peu représentatif mais c’est drôle.

J’aurais voulu un portrait un peu plus varié et exhaustif, cependant il y a une forme amélioré d’écriture journalistique qui se lit sans déplaisir.

Et puis, ne boudons pas notre plaisir, ça nous fait toujours du bien que l’on parle de nous et quand c’est écrit avec un certain talent…

Qui a dit déjà : « Parlez-moi de moi, en bien ou en mal mais parlez de moi ! » ?

Un égocentrique sans doute.

Les français le sont un peu, ce que les étrangers ne peuvent pas comprendre et ça les agacent.

C’est normal, nous sommes les meilleurs !

 

« Gens de la Lune »

John Varley

Éditions Folio SF

À peu près 10.00 €

 

Comme le nom de l’éditeur l’indique, il s’agit là de science-fiction.

On pourrait même dire : hard-science-fiction.

Rien d’équivoque dans cette classification (que j’invente peut-être), je veux dire par là qu’il s’agit de SF pure, traditionnelle, une SF « canal historique » en somme.

Comme Isaac Asimov qui créait un monde à partir de ce qu’il connaissait (avec les outrances propres au genre, bien sûr), John Varley nous décrit un monde qui pourrait bien advenir si l’on imagine certaines choses possibles.

Assez peu d’ailleurs : des techniques médicales qui peuvent rendre les êtres humains quasi-immortels et la colonisation de la Terre par des extra-terrestres.

Des extra-terrestres qui n’apparaissent pas d’ailleurs.

Une partie de l’humanité s’est réfugiée sur la Lune (quelques millions de personnes) et à inventé une nouvelle façon de vivre basée sur un hédonisme extrémiste.

On découvre cette société à travers les yeux et la vie d’un journaliste cynique et dépressif.

Il arrive des choses assez épatantes dans cette société du futur (pas trop lointaine à ce qu’il semble) notamment une totale absence de préjugés sexuels.

Tout le monde couche avec tout le monde, sans gènes et sans tabous, à tel point que le narrateur devient au milieu du livre, et pas la grâce d’une opération bénigne, une narratrice.

Ce qui est plaisant, en plus du réel talent d’écriture, c’est que John Varley nous construit une société complètement dingue mais qui se tient.

C’est inventif, maîtrisé et ça se lit facilement.

Les personnages sont attachants, les états d’âmes du narrateur sont plausibles pour la société dans laquelle il vit et la cohérence du propos rend la lecture haletante.

Pourtant c’est un roman assez intimiste et c’est un tour de force de l’avoir fait sous cette forme là.

Il n’y a pas de batailles spatiales, ni de voyages interstellaires, encore moins de rencontres du troisième type.

Tout le contraire du space-opera qui a une petite tendance à me faire chier dernièrement.

Il est assez rassurant que le genre science-fiction puisse produire des romans où l’on n’est pas obligé d’imaginer la démesure.

Très bonne lecture.

 

 « 1000 Chefs-d’œuvres de l’érotisme »

Joe A. Thomas et Victoria Charles

Éditions Terres éditions

29.90 €

 

Je sais ce que vous vous dites : « La Maîtres des Bouviers est un libidineux salace ! ».

Oui, c’est vrai.

Mais ce n’est pas pour ça que j’ai acheté ce livre.

Non.

Non, parce que je me suis rendu compte que je n’avais pas, dans mon fonds de bibliothèque, de livres d’art.

Vous savez bien, ces livres que vous achetez pour éblouir le Nonce et sa Noncette lorsque vous les conviez à diner mais que l’on ne lit jamais parce qu’après tout les livres sur l’art ça fait braire.

Donc, me suis-je dit, tant qu’à investir dans un livre d’art autant prendre comme sujet traité quelque chose qui présente un intérêt même minime.

L’art industriel au XXème siècle ? Non !

Les peintures rupestres du néolithique ? Non plus !

Les sculptures d’étrons de chien ? Encore moins !

Donc une anthologie pour que ça soit varié.

Et sur l’érotisme pour que ce soit un peu piquant.

Mais pas vulgaire.

Et bien, figurez-vous, ça se lit.

Pas d’une traite, non, plutôt par petit bout, au hasard d’une page.

C’est très plaisant, on n’apprend pas forcement quelque chose mais c’est intéressant.

Et puis il n’est jamais inutile de savoir comment les artistes (peintres, sculpteurs et photographes) représentent les corps au travers des siècles, combien d’efforts ont été déployés pour suggérer, exciter, titiller les sens avec talent.

Parce que c’est beau.

Si ! C’est fichtrement beau.

 

« Une éducation libertine »

Jean-Baptiste del Amo

Éditions Gallimard NRF

19.00 €

 

Je ne sais pas trop comment prendre ce bouquin.

J’ai d’abord été curieux.

Curieux de savoir ce qui avait bien poussé la si vénérable NRF (vous savez les livres à couverture crème au liseré noir et rouge) à publier un premier roman d’un auteur de 26 ans et avec un titre pareil.

La NRF ne nous avait pas habitué à ça.

Audacieux et culotté.

Qu’est ce que ça donne à la lecture.

Ben, je ne sais pas.

Non, franchement, il y a une grande maîtrise de la langue, c’est recherché sans être casse-pied, il n’y a pas de lourdeurs dans le style et la manière d’écrire, on pourrait même dire qu’il y a de la virtuosité.

Le thème abordé l’a été de nombreuses fois (sous d’autres formes mais la trame y est) mais il n’est pas interdit de s’y frotter.

L’histoire : un jeune homme, vers 1760, quitte sa Bretagne natale et monte à Paris, il y rencontre un jeune aristocrate vicieux (libertin, si l’on veut) et séduisant dont il tombe amoureux. On suit son ascension dans la société par d’honteux moyens et ça fini mal.

Rien de nouveau depuis les « Liaisons dangereuses ».

Ce qui nous frappe c’est l’écriture ultra-réaliste de l’auteur dans la description  du Paris de cette moitié du XVIIIème siècle.

On sent la documentation sur la vie du petit peuple en ces temps là.

Et ce n’est pas joli, joli, mais bien écrit.

C’est bien là le problème. J’ai l’impression que ce jeune homme (l’auteur !) à des obsessions de style et la métaphore un peu outrancière et répétitive.

Je vous explique.

L’ouvrage commence par une description de Paris, pas celui des aristocrates ou des bourgeois, celui du peuple, et ça sent.

Ça pue quoi !

La description de cette puanteur est saisissante, prenante et envoutante. On est bluffé et admiratif, un peu dégouté aussi mais c’est fait exprès et tant mieux.

Les images, les métaphores sont pertinentes.

Bon !

On s’attend alors à passer à autre chose, on a compris que ça pue, ok !

Ben non, pas du tout.

Jean-Baptiste del Amo remet ça, encore, encore et encore.

Jusqu’à la nausée puisque j’ai même été tenté de sauter certaines lignes.

Mais on continue cependant parce que, je le redis, c’est talentueux et que la peinture de la société de l’époque est brillante.

On s’accroche aux longues descriptions très détaillées sans ennui, certes sans ennui mais on s’accroche quand même.

Et l’histoire est palpitante, les émotions du héros sont bien rendues mais…

Ben, oui, mais !

Et puis flûte !

Franchement, arrivé au deuxième ou troisième chapitre, on en a un peu soupé de la crasse, de la merde, aussi du pus, du foutre, de la bave quand il s’agit de fluides corporels, et des croutes, des pustules, des chancres, des bubons, et ça pue, ça pue, ça pue, ça n’arrête pas de puer.

C’est un peu lassant.

Ce que je n’arrive pas bien à comprendre c’est que j’ai quand même lu ce bouquin jusqu’au bout.

Le sentiment d’après lecture est très mitigé, admiration pour le talent (26 ans et édité à la NRF !), plaisir de lire un français manié avec brio mais comme une sorte de malaise à partager les obsessions de l’auteur.

En a-t-il d’ailleurs ?

Pas sûr.

J’ai toujours volontiers suivi un écrivain là où il voulait m’emmener, après tout ils sont là pour ça : nous prendre par la main pour nous promener dans leur univers.

Là, malgré une histoire intéressante, je ne sais pas où je me suis promené.

Et je ne suis même pas sûr de le regretter.

Faites-vous un avis.

 

Belles et bonnes lectures.

 

Le Maître des Bouviers

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